© Franquin
Tandis que mai ename ses beaux jours, je vous présente, extraits des sites des éditeurs, les arguments d’ouvrages passés entre mes mains, à défaut de mes yeux..
Qui sont les maîtres du monde ? Ce pourrait être ces vieillards qui jouent à la scopa dans l’arrière-salle d’un café de Trieste, là même où Joyce, Svevo et Saba ont inventé la littérature du XXe siècle. Aussi cultivés que mythomanes, ils ont accueilli dans leur groupe Elio qui a débarqué un jour de la gare centrale en provenance de Zurich dans l’oubli de tout ce qu’il était. Et si par une curieuse thérapie il recouvre peu à peu son identité c’est pour découvrir qu’elle est placée sous le signe de la vengeance la plus redoutable.
Des découvertes scientifiques aux méandres de la psyché, du mythe de l’enfance à celui de l’amour fou, des dérives du capitalisme au rêve millénaire de la maîtrise du monde, le XXe siècle a été un creuset diabolique. À Trieste, lieu de brassage de toutes les cultures, en ce dernier jour de 1999, Elio est à la fois le magicien et la victime d’une machinerie planétaire aussi puissante que vertigineuse.
Après Chroniques des quatre saisons (1998) et Les trois saisons de la rage (2010) qui a reçu le Prix des libraires et le Prix Historia, Victor Cohen Hadria poursuit avec Les maîtres du monde une œuvre insolite et inclassable.
Entremêlant les époques avec brio, ce premier roman vibrant nous fait voyager à travers la Sérénissime, rencontrer l’un des plus grands compositeurs de musique baroque, et rend un hommage poignant à ces orphelines musiciennes, virtuoses et très réputées au XVIIIe siècle, enfermées pour toujours dans l’anonymat.
Sept femmes autour d’une table bien garnie célèbrent la « Journée des femmes ». Parmi elles, Lyane, la narratrice, seule Française dans le groupe…
Nous sommes à Tachkent, capitale de l’Ouzbékistan (ancienne Tartarie, comme on désignait autrefois cette Asie centrale lointaine et mystérieuse), le 8 mars 2014.
Sous forme d’interviews et de récits croisés ou emboîtés, un peu à la manière des Contes des Mille et une nuits, Lyane Guillaume nous entraîne dans une fresque multicolore à la suite de ces femmes d’aujourd’hui ou d’hier, anonymes ou célèbres, humbles ou puissantes, qui ont marqué et continuent de marquer l’Ouzbékistan de leur empreinte. Des harems de la Route de la Soie (Samarcande, Boukhara) aux business women actuelles, de Bibi, épouse du redoutable Tamerlan, à Rano, mariée contre son gré à son cousin, en passant par Tamara Khanoum, première danseuse ouzbèke à se produire sur scène, ou encore Sayora, médecin de campagne sur les rives de la mer d’Aral, à la recherche de son fils radicalisé, c’est toute la réalité riche et complexe de l’Ouzbékistan terre d’Islam mais aussi ex-république soviétique qui se révèle à travers ces voix féminines.
Tour à tour épique, bouleversant, drôle, coloré, pimenté, en tout cas savoureux comme la cuisine ouzbèke, ce récit à sept voix sur les femmes d’Ouzbékistan est à la fois un livre d’histoires et un livre d’Histoire.
Mille et un jours en Tartarie, Lyane Guillaume, récit, Ed. Rocher, février 2017, 416 pp
Un enfant n’écrit pas de roman et l’adulte que devient cet enfant ne peut que conter son énigme, abouter les vues, les séquences et les bribes du fond remuant de sa légende. » Michèle Cointe
Tissé d’images intactes et d’ombres du passé que l’écriture fait remonter à la mémoire, le récit de Michèle Cointe, où l’enquête, illustrée d’une collection de photos, prend la forme d’une exploration poétique, est avant tout le retour au monde de « l’enfantin » dans ce qu’il a d’unique.
Constance, l’aînée, arrive avec les courses et toute sa famille. Dan rentre de Toronto, sans son copain Ludo, dont il vient pourtant d’accepter la demande en mariage. Leur cadet, Emmet, qui coordonne des opérations humanitaires, traîne un chagrin d’amour. Et la benjamine, Hanna, actrice à la capitale, apporte ses doutes et ses joies face à sa maternité toute récente.
Anne Enright examine cette réunion familiale et le passé de la fratrie avec une formidable acuité psychologique et son franc-parler réjouissant. Elle insuffle dans son roman une profonde empathie pour ces êtres qui négocient chacun un tournant délicat de la vie.
La guerre menace, les masques vont tomber. Alice découvre les conspirations qui bruissent dans les couloirs feutrés du Vatican et les rues ensanglantées de Berlin. Son attirance pour un journaliste allemand au passé trouble révèle les fêlures de son passé. Si l’aventurière ne renie jamais ses convictions de femme moderne, toute liberté a un prix. Jusqu’où ira-t-elle pour demeurer fidèle à elle-même ?
Des palais de Rome à la corniche d’Alexandrie, des montagnes d’Éthiopie aux plaines de Castille, une Américaine intrépide et passionnée témoigne d’un monde qui court à sa perte. Theresa Révay nous offre l’inoubliable portrait d’une femme pour qui la vie ne brûle et ne danse qu’un instant.
Quand les destins de Cristian et de Domenico croisent celui de Maddalena, toutes les certitudes s’évaporent, toutes les valeurs se perdent, pour donner naissance à une passion lourde de non-dits et de jalousie, coups de théâtre, trahisons et réconciliations.
Car Cristian Chironi et Domenico Guiso ont grandi comme deux frères : ils partagent tout, la famille, l’école, le travail. Ce sont les années 80, les années de la modernisation de la Sardaigne, mais aussi du terrorisme, une période de violence politique et de spéculation immobilière, de culte de l’individualisme et du profit roi. La famille Chironi est à l’apogée de son ascension sociale, ce qui n’empêche pas le sort de continuer à s’acharner contre elle.
Si Cristian et Maddalena semblent faits l’un pour l’autre, c’est à Domenico que cette dernière, enceinte, est promise. Cristian a-t-il encore sa place à Nuoro ? Sa compromission dans une sombre histoire de trafic d’armes semble indiquer le contraire. Est-ce un piège tendu par les Guiso, père ou fils, pour des raisons économiques ou par vengeance ? On le croit mort, on le retrouve en Lettonie…Quoi qu’il en soit, le fils de Maddalena semble porter en lui la « génétique sans pareil » des Chironi.
Né en 1961 en Sardaigne, Marcello Fois vit aujourd’hui à Bologne. Ses romans sont traduits dans de nombreuses langues et ont obtenu plusieurs prix italiens et internationaux.
La lumière parfaite, Marcello Fois,roman traduit de l’italien par Jean-Paul Manganaro, Ed Seuil, mars 2017, 382 pp
Autour, rien que l’herbe verte, les trembles aux feuilles chargées de pluie et le ciel changeant du Donegal. Ce refuge, Daniel Sullivan s’apprête à le quitter le temps d’une semaine pour se rendre aux États-Unis, son pays d’origine. C’est l’anniversaire de son père, qu’il n’a pas vu depuis des années.
Dans la voiture qui le conduit à l’aéroport, une voix retentit à la radio : celle d’une femme dont il est sans nouvelles depuis vingt ans, son premier amour.
Les souvenirs se déversent. Replonger dans le passé, comprendre ce qui le pousse à abandonner ceux qu’il aime, Daniel ne pense plus qu’à ça.
Mais il y a son épouse Claudette, star de cinéma fantasque, passionnée, qui a choisi d’organiser sa propre disparition pour échapper au monde. Comment lui révéler l’homme qu’il est véritablement ? Que peut-il encore promettre, lui qui n’a jamais su que fuir ?
Assez de bleu dans le ciel, Maggie O’Farrell, roman traduit de l’anglais (Irlande) par Sarah Tardy, Ed. Belfond, avril 2017, 504 pp
De la même plume:
Tombée dans un profond coma, au gré des flottements de sa conscience, la jeune femme se souvient : de l’amour fou avec John, un journaliste, fils d’un juif intégriste qui l’a renié ; de l’étrange enfant, puis de l’adolescente fragile et rebelle qu’elle a été ; de l’affection d’Elspeth, sa grand-mère, et des heurts avec sa mère, Ann, beauté froide et énigmatique.
Et, tandis que la famille guette le moindre signe d’espoir, Ann est elle aussi rattrapée par le passé. La genèse de ce drame affleure…
Quand tu es parti, Maggie O’ Farrel, roman traduit de l’anglais (Irlande) par Marianne Véron Ed. Belfond, avril 2017, 376 pp
Le corps de Marco Morello, fils d’un caïd de la ’Ndrangheta, vient d’être découvert « ligoté comme un capocollo, la tête en bas » dans une fosse, en plein maquis. En clair, saucissonné avec du fil de fer et pendu par les pieds : que signifie cette mise en scène troublante ? Tout désigne une vendetta entre familles rivales. Et personne ne voulant perdre de temps avec ces gens-là, on confie l’enquête au « petit juge » Alberto Lenzi, sa réputation de flemmard le destinant aux cas sans intérêt ni relief. Or malgré les apparences, Lenzi est consciencieux, intuitif et têtu. Peu convaincu par la piste mafieuse, il s’adresse à don Mico Rota, le vieux « parrain » roublard qui règne sur la région et sait tout sur tout. Conforté dans son hypothèse, Lenzi n’est cependant pas plus avancé. Et moins encore lorsqu’un deuxième meurtre change la donne : celui d’un flic, soupçonné de longue date de corruption et de collusion avec le crime organisé. La ’Ndrangheta serait-elle dans le coup, finalement ?
Né à Santa Cristina d’Aspromonte en 1950, Mimmo Gangemi est ingénieur. Il a commencé à écrire sous l’impulsion de son ami Giancarlo De Cataldo. Il vit à Palmi, dans la province de Reggio Calabria, et collabore à La Stampa. La critique italienne l’a surnommé « le Sciascia de l’Aspromonte. »
La Vérité du petit juge, Mimmo Gangemi, roman traduit de l’italien par Christophe Mileschi, Ed Seuil, avril 2017, 286 pp
Commentaires récents