Une collection très particulière

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« Oui, je le dis: combiner du Laspallières, c’est être un écrivain. C’est dans cet esprit qu’il a conçu son oeuvre: comme une bibliothèque ouverte où les hommes de bonne volonté peuvent puiser pour écrire, dès lors qu’ils ont du courage, du caractère et un peu de talent. »

 Retrouvant son cher Pierre Gould – le héros récurrent des Contes carnivores – le narrateur est invité à découvrir les sections de son étrange bibliothèque: les ouvrages écrits par des amnésiques côtoient ceux qui tuent le lecteur, le font mourir d’ennui,  lui insufflent de l’énergie, exigent un dress code, se prêtent, en vraies gigognes à une infinité de lectures et ceux qui se sont vus renier par leurs auteurs, ou dont le contenu s’évapore, faute d’être consulté.

 Nouvelles, fables, allégorie de l’écriture,  les chapitres consacrés à la littérature et son absurdité jubilatoire sont coupés des récits de découvertes de villes imaginaires – ville-miroir, ville soporifique, hypermnésique… – et de travers de société pour le moins déconcertants: échangisme…d’identité, multiplication de celles-ci, rajeunissements intempestifs, ….

 Renouant avec la veine drôlissime des « Contes carnivores » (Le Seuil 2008 – Prix Rossel) et celle d’un Petit Prince, en voyage en Absurdie,  l’écrivain belge  – il enseigne le Droit à Dijon – mène à son comble, avec une rigueur cartésienne,  la logique de raisonnements loufoques.

 Quiriny rime avec… génie.

 Apolline Elter

 Une collection très particulière, Bernard Quiriny, nouvelles, 186 pp, 17 €

 

Prolongation de lecture:

 AE, Bernard Quiriny, la visite de la bibliothèque de Pierre Gould dévoile une série important e de pistes de romans. C’est le côté « gigogne » d’Une collection très particulière ? 

Bernard Quiriny : D’une certaine manière, oui : ce livre possède un côté « malle aux trésors », ainsi qu’un côté Rubik’s Cube. Mais je crois que les faux romans inventoriés par Gould sont destinés à demeurer à l’état imaginaire. A moins qu’un auteur désoeuvré ne veuille les écrire…

AE :  Enrique Vila –Matas avait signé la préface des Contes carnivores. Est-il meilleur hommage que d’évoquer La Lecture assassine,  « un livre qui tue ses lecteurs. »

Bernard Quiriny : Non seulement il m’avait fait l’honneur de préfacer « Contes carnivores », mais il m’a cité dans son « Journal Volubile ». La moindre des choses était de l’inclure à mon tour dans ce livre, comme je l’avais déjà fait dans « L’Angoisse… ». Disons que c’est une sorte de correspondance implicite transportée par livres.

 AE : Un écrivain a-t-il toujours besoin d’un  « caillou dans sa chaussure  pour le faire boiter » ?

Bernard Quiriny : Je n’en suis pas sûr. C’est une théorie de Gould, mais elle ne me convainc qu’à moitié. Personnellement, le moindre caillou dans ma chaussure aurait tendance à me paralyser. Ce qui me permet, pour une fois, de n’être pas d’accord avec lui.