» C’est ainsi que même si je fus parfois leur adversaire, j’ai bien connu deux de vos grands hommes qui jouèrent un rôle important dans le sauvetage de vos monuments historiques, Prosper et Toto. »
Celle qui nous parle – qui s’adresse à la France – se nomme Emily Dingham, jeune, veuve et Anglaise, personnage de pure fiction. .. Sorte d’antiquaire, elle pille copieusement un patrimoine français, mis à mal par la Révolution, achetant à vil prix des oeuvres, qu’elle vend à ses compatriotes, lestée d’une marge des plus confortables…
Ses pas et appâts croisent Prosper – entendez Mérimée – qui vient tout juste de décrocher, en cet an 1834 le poste d’Inspecteur général des Monuments historiques. S’il n’avait vocation pour la fonction – il se préfère écrivain – le jeune homme va rapidement se prendre de passion pour la sauvegarde du patrimoine national. On peut prévoir qu’il ne verra guère d’un bon oeil, l’activité un peu louche d’Emily, jolie.
Quant à « Toto » – vous aurez d’emblée reconnu Victor Hugo, le grand, l’illustre poète – il nous apparaît sous un angle, sinon neuf, du moins singulièrement vivifiant.
Le coup d’Etat du 2 décembre 1851 consacre la rupture entre les deux hommes, la fin d’une amitié de quelque vingt-cinq années. Proscrit, Victor Hugo fuit à Bruxelles, s’exile à Jersey, Guernesey – en tout dix-neuf années -tandis que Prosper … prospère et se dilue, dans le sillage du couple impérial.
Les portraits de Juliette Drouet, Esprit Requien, Eugène Viollet-Leduc, Eugénie et Napoléon III , … parcourent allègrement les pages d’une narration tonique et vivace, soutenue d’une érudition assez remarquable.
Une lecture des plus agréable
Apolline Elter
Une aventure monumentale, Olivier Dutaillis, roman, Ed. Albin Michel, mai 2016, 346 pp
Billet de faveur
AE : A travers les protagonistes – la plupart ont réellement existé – ce sont aussi les grands chantiers de Vezelay, Notre-Dame de Paris, tracés haussmanniens que vous brossez. Ils en deviennent presque des personnages. Était-ce votre intention de départ ?
Olivier Dutaillis :
Mais oui ! La difficulté du sujet était de donner de la chair aux pierres ! De faire en sorte que les monuments soient incarnés. De les présenter finalement dans le sillage de Victor Hugo qui a eu le génie de montrer Notre-Dame de Paris sous les traits d’Esmeralda et de Quasimodo… Je n’avais aucune stratégie en tête, au départ. Mais la nécessité de trouver des enjeux humains pour évoquer ces chantiers s’est très vite imposée. Ainsi, derrière les ruines d’un aqueduc romain, il y a l’idée qu’à cette époque l’adduction de l’eau favorisait l’érotisme… Derrière des fresques du Moyen-Age, comme à Saint-Savin, il y a des jeunes artistes confrontés aux mêmes contraintes que les tagueurs d’aujourd’hui… Derrière Vézelay, il y a une gigantesque arnaque aux reliques et le détournement de l’argent des pèlerinages… Dans les monuments, il y a quelque chose qui nous touche malgré nous. J’avais envie que ce roman nous rapproche des êtres humains qui nous y ont précédés.
Vous souhaitez rencontrer l’auteur:
Olivier Dutaillis sera présent, en signature, les
– samedi 11 juin, de 14 à 18h, au Festival d’Issy-les-Moulineaux.
Et le jeudi 16 juin à la LIbrairie La Belle Lurette, rue Saint-Antoine, 75004 Paris à partir de 19h30.
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