Notre célèbre compatriote possède, entre autres nombreuses qualités, celle de la courtoisie.
De la ponctualité corollaire.
Jamais ne faut à son rendez-vous métronomique de la rentrée littéraire.
Et c’est ainsi que depuis de nombreuses années, votre site préféré lance l’envoi de ses chroniques par la recension du nouvel « Amélie Nothomb »
Mais encore.
Un roman de haut vol paraît ce jour, portrait intime, confié à ses lecteurs.
Clef de voûte et de compréhension de son oeuvre et en particulier de l’écriture psychopompe de ‘ » Soif » (Ed. Albin Michel 2020) et « Premier sang » (Ed. Albin Michel 2021)
Psychopompe? Celui qui, tel Hermès, messager ailé et divin, conduit l’âme des morts, les accompagne et se propose interface avec le monde des vivants
« Dira-t-on jamais assez la jouissance de l’engoulevent? Il se jette dans le vent comme dans la volupté, tour à tour, il le contre puis lui obéit puis l’étonne puis s’offre, il est l’amant génial du courant d’air »
Vous l’aurez saisi – au vol – Amélie Nothomb nous livre son portrait, ses obsessions, convictions, vie en mode… aviaire
« Quand on se sent incapable d’une pensée digne de ce nom, il reste l’observation: voici ce que m’apprit l’amour des oiseaux »
Fascinée par les oiseaux depuis sa prime enfance et le conte nippon de femme-grue révélé par sa chère Nishio-San, la future écrivain observe leurs us et chants, à travers les pays où la mène la carrière diplomatique de son père, Patrick Nothomb
Son identité se fond, se confond, peu à peu en eux
Les résidences se succèdent au Japon, Chine, Etats-Unis, Bangladesh, Brimanie …qui voient lentement éclore l’enfant de sa coquille (d’oeuf), fracasser celle-ci d’une scène de viol collectif au Bangladesh (station balnéaire de Cox’s Bazar) et entreprendre la difficile constitution de ses plumes, (re)construction de son âme, par un biais précisément plumitif, entendez l’écriture.
C’est dire comme cette dernière est salvatrice, essentielle, existentielle dans le chef de la romancière.
Balisant sous cet angle, les étapes de sa vie, le lien psychopompe qui l’unit à son père peu après son décès, Amélie Nothomb livre, en confiance, sa pratique de l’écriture, son approche de la mort
Il en résulte un texte bienfaisant, drôle par moments et par exquise autodérision, véritable cadeau fait aux lecteurs que nous sommes
Un texte qui se lit (et relit, mais oui déjà) à plusieurs niveaux.
En fait, il est d’une extraordinaire puissance.
Et se clôt d’un très engageant « Je n’ai pas dit mon dernier mot »
On y compte bien.
Apolline Elter
Psychopompe, Amélie Nothomb, roman, Ed. Albin Michel, août 2023, 164 pp
Une invitation: découvrez l’excellente interview menée de micro de maître par notre confrère Pascal Schouwey :https://www.youtube.com/watch?v=nvluQ_94DQw