« Ça aura été incroyablement facile de passer, comme promis, à travers les murs de chez Gallimard pour Y planer, esprit follet, et découvrir avant tout le monde les manuscrits des futurs grands noms de la maison, les Aragon, Cohen, Sartre, Michaux, Simenon … Et je n’aurai pas dû insister beaucoup à l’oreille de Gide pour qu’il s’enthousiasme aussi.J’évite toutefois le sujet Proust, dont le manuscrit a été par lui écarté, éternelle écharde. Mais c’était avant. Je suis arrivé trop tard. »
Renouant avec le ton espiègle, uylenspiegelien du Petit éloge de la Belgique (Essai, Gallimard, Folio 2 €, 2022) ,cette familiarité qui l’invite à tutoyer les Grands de ce monde – et surtout de celui d’avant – Grégoire Polet nous propose un voyage à travers villes et temps épicentré, si j’ose dire, sur 1919, la Conférence de la Paix (d’où « Pax ») et le Traité de Versailles.
Vrai passe-muraille, il ne s’y confine cependant pas et nous propose des sauts d’un très large élastique spatio-temporel à travers Bruxelles, Paris, Weimar, VIenne, .. et des rencontres aussi prestigieuses qu’accortes avec Henry van de Velde, le président Wilson (USA) Sigmund Freud, Marcel Proust, Victor Hugo , le « Kaiser » Guillaume et même Milou – entendez Emile Cotin. Bien évidemment.
Procédant de quinze chants et d’une vaste culture, le roman couronne également les quelque vingt années de publications de l’auteur au sein de la Maison Gallimard, revient brièvement sur la remise du manuscrit qui donnera Madrid ne dort pas, en 2005.
Grégoire Polet avait alors vingt-sept ans.
Apolline Elter
Pax, Grégoire Polet, roman, Ed. Gallimard, mars 2024, 440 pp