Deux rendez-vous à vous proposer en ce 3e jour du Festival de la correspondance de Grignan
Celui de « Parfum de lettres » dès 10 heures au Jardin Sévigné – je vous y attends en liesse fragrancée
Et puis, à 18h, au mail bien nommé, la lecture » Grain de voix » opérée par Lara Suyeux de lettres de prison de Rosa Luxemburg (1871-1919)
Je relaie avec plaisir la quatrième de couverture de l’édition de lettres, opérée par Filip Forgeau ( Ed Triatis)
Rosa Luxemburg est détenue en février 1915 pour avoir exhorté les prolétaires allemands et français à ne pas prendre part à la grande boucherie que promettait d’être la Première Guerre mondiale…
Libérée puis réincarcérée de juillet 1916 à novembre 1918, elle suit la progression de la révolution russede 1917.
Durant ces périodes d’enfermement, elle écrit régulièrement à Sonia, la seconde épouse de Karl Liebknecht, avec lequel elle a fondé le groupe Spartakus.
Loin de se limiter au militantisme politique, ses lettres portent en elles l’amour que Rosa a de la vie, sa foi en l’être humain, son émerveillement face à la nature et au monde animal, et ajoutent à sa vérité révolutionnaire et antimilitariste une dimension humaniste. Comme si seules la contemplation et la compréhension du monde et du vivant à travers les barreaux de sa prison pouvaient engendrer la réflexion et produire l’exaltation nécessaire à l’action
Découvrons un extrait d’une lettre à Sonia, datée de février 1915.
« Tout l’essentiel est là : après deux semaines d’incarcération, j’ai arraché l’autorisation d’avoir des livres et de quoi écrire. Et, grâce à ce que j’écris, je ne suis plus enfermée, j’ai la sensation de m’être déjà évadée et de peser sur l’histoire qui se déroule au-delà des murs de la prison de Barnimstrasse. C’est que je suis la « prima donna rouge », et le pouvoir ne peut user contre moi de moyens trop brutaux. Même en prison, je tiendrai mon rôle sur la scène où se joue l’Histoire et, chaque jour, de là où je suis, même privée de liberté, je veillerai à ce que la revue L’internationale paraisse. «
Et ce passage émouvant, d’une lettre à la même » Sonioucha », datée du 2 mai 2017
« Ce matin, j’ai trouvé, au pied du mur le long duquel je me promène, une violette ! L’unique violette de mon petit jardin. Je vous l’envoie. J’y ai déposé un baiser de mes lèvres afin qu’elle vous apporte mon amour et mon amitié. Sera-t-elle encore fraîche lorsqu’elle vous parviendra ? »
Les voeux d’un Noël qu’elle …veut jpyeux:
« Breslau, avant le 24 décembre 1917
Sonitchka, mon petit oiseau,
Prison, deux points : maison sombre et triste. C’est mon troisième Noël en cabane, mais ce n’est pas tragique. Je suis sereine et gaie, comme toujours. »
Extrait de l’édition:
Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg est sauvagement assassinée avec son compagnon de lutte Karl Liebknecht par les Freikorps – les Corps Francs –, puis jetée dans le canal Landwehr de Berlin. Les circonstances de son assassinat ne
seront dévoilées que le 12 février.
Rosa Luxemburg- Lettres de la maison sombre et triste (1915 – 1918) suivi de Rosa, Rosae, Rosa L.Autres lettres de la maison triste et sombre Poème dramatique, Filip Forgeau, Ed. Triartis, Scènes intempestives à Grignan, juillet 2021, 64 pp