L’invitation est forte: Gisèle Halimi entreprend la rédaction de l’ ouvrage, le 27 juillet 2007, jour de ses 80 ans. Ce jour-là, avec une « tête intacte, nickel, et peut-être plus.(…) pleine à craquer de livres lus et d’expériences uniques. D’audace et de sagesse (acquise par la force des choses). De logique et de fantaisie » (p 12) la célèbre avocate décide de faire le point sur son action, sur l’engagement de sa vie au service de la cause féminine.
Un féminisme pragmatique, ancré sur fond de révolte . A la différence de Simone de Beauvoir dont on pourrait qualifier le féminisme d’intellectuel, partant, de froid, Gisèle Halimi insuffle à son combat une dose essentielle d’empathie, de compassion. Brimée dans son enfance tunisienne en tant que femme, elle ne cessera désormais de surmonter ce handicap originel, avec une force proportionnelle à l’injustice ressentie.
C’est sur ce féminisme subjectif, « solitaire dans la pensée, collectif dans l’action » (p 59) que l’écrivain s’interroge, évoquant sa genèse, celle du mouvement « Choisir – La Cause des femmes » qu’elle fonda tout début des années ’70, le célèbre « Manifeste des 343 » (avril 1971) par lequel 343 femmes, célèbres et inconnues confondues, reconnaissent avoir avorté et le très médiatisé procès de Bobigny *, lequel cristallise autour du viol d’une jeune fille de 16 ans, Marie-Claire Chevalier, le droit à l’avortement.
S’ensuit l’analyse des facteurs nuisibles à la dignité féminine que sont la prostitution, la dépendance financière et la violence conjugales.
« Les femmes connaissent le prix de leur indépendance économique. Il est lourd » (p 147)
La dernière partie de l’ouvrage trace l’engagement politique de Gisèle Halimi, la marginalisation persistante de la femme dans ce domaine et les dérives possibles.
Et l’auteur d’inviter les générations actuelles, fortes des acquis engrangés, mais en proie à l’expérience toujours renouvelée du « handicap » féminin, à ne jamais…se résigner.
Apolline Elter
Ne vous résignez jamais, Gisèle Halimi, Plon, janvier 2009, 246 pp, 20, 90€.
* Le procès de Bobigny fera l’objet d’un téléfilm attachant, réalisé par François Lucciani, avec notamment Anouk Grinberg dans le rôle de Gisèle Halimi, Sandrine Bonnaire, dans le rôle de la maman de la jeune accusée et Marie Bunel en faiseuse d’ange.
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