S’il se fait « une joyeuse idée de la France » c’est parce qu’Alexandre Jardin revendique une triple paternité dans ses choix d’existence. Trois zèbres , trois « maîtres à oser » incarnés par Sacha Guitry, Charles de Gaulle et Giacomo Casanova. Trois lumineuses illustrations des verbes « jouer, défier et jouir » qui conditionnent la vie de l’écrivain et un triple parti-pris qu’il entend partager avec le lecteur.
» Ce trio d’enchanteurs prouve que l’on peut s’engendrer soi-même au lieu de se contenter d’être né. «
De Sacha Guitry, le lecteur retiendra l’être démesuré, fou à …faire exploser les zygomatiques, qui conçut sa vie comme une scène dramatique, garde- fou quotidien de l’ennui; l’être décalé, aussi, qui durant l’Occupation, persista à afficher un luxe, une sympathie vichyste qui lui seront durement reprochée à la Libération.
« Charles de Gaulle est mon plus grand secret.
Mon angle mort le mieux préservé, ma fièvre.
Mon vrai père »
Figure plus austère que celle du Général, mais également fascinante:
» Ce gentilhomme de l’effronterie a fait de moi, dans le plus grand secret – oui, sans que les miens y aient eu quelque part- , un type hautement allergique à la fatalité, haïssant toutes les formes de statisme. Un militant associatif qui chaque matin entend l’appel permanent du 18 juin, cette invitation à nager contre tous les courants de la renonciation à soi. »
Sa passion pour Giacoma Casanova, la parfaite anti-thèse gaulliste, Alexandre Jardin la justifie, par cette jubilation sans borne que le Vénitien traduit, irradie, tandis qu’il taste et tâte, sans vergogne, tous les plaisirs de l’existence.
Et le lecteur de savourer le brio d’ une plume magnifiquement inspirée, une nouvelle fois
Apolline Elter
Mes trois zèbres, Une joyeuse idée de la France, Alexandre Jardin, essai, éd. Grasset, oct. 2013, 332 pp, 20 €
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