Après le triomphe que valut la représentation de Bunker, le 6 juillet passé, lors du Festival de la correspondance de Grignan, possibilité est donnée, à ceux qui l’ont ratée – ou souhaitent la revoir mais oui cher Pascal Schouwey, qui fîtes, à cette fin, le voyage depuis Genève – chance est donnée, vous dis-je, d’y assister, les jeudi et vendredi soir, dans le cocon du théâtre Tristan Bernard ( Paris VIII)
Centrée sur la personnalité complexe, progressivement monstrueuse, de Magda Goebbels (1901-1945) , la lecture-spectacle écrite par Christian Siméon, trace la vie de celle-ci, depuis son adolescence choyée jusqu’à ses derniers jours au sein du bunker où elle a rejoint Adolf Hitler, avec son mari Joseph Goebbels (1897-1945) et leurs six têtes blondes, toutes de H prénommées, Helga, Hilde, Helmut, Holde, Hedda, Heidi .
Il faut une incroyable puissance d’introspection pour incarner par le texte – bravo à Christian Siméon – par l’interprétation – magistrale Julie Depardieu- le destin de cette femme, belle, intelligente, fascinée par Hitler et la propagande nazie au point de penser que ses enfants n’étaient pas formatés pour le monde qui se profilait, après la défaite de 1945. C’est pour cela qu’elle les tue, un à un, froidement aimante, convaincue de son dessein, au lendemain du suicide d’Hitler et qu’elle se donne la mort, avec son époux, dans la même journée.
Une femme qui a été élevée par un beau-père juif, accédant grâce à lui à un milieu huppé qui ne lui était pas destiné, qui a aimé Victor Arlosoroff, prête à épouser avec lui la cause sioniste
Une femme qui épouse Günther Quandt, patron de BMW, de quelque vingt ans son aîné, lui donne un fils, Harald, s’ennuie, divorce, s’ennuie….
Car c’est l’ennui qui lui vaut le ralliement à la cause nazie
La fascination pour le charisme porté par Hitler et Goebbels, son ministre de la propagande
Pour eux, pour le trio ténu qu’ils forment, elle est prête à endosser le rôle de la parfaite mère de famille, à éduquer ses six nouveaux chéris dans le pur respect des mantras du Reich
Tout cela, Julie Depardieu le porte, le transmet et bouleverse l’assemblée de la lecture de cette lettre qu’elle envoie à Harald, son fils aîné, aux fins de justifier son plan familial funeste et fatal
Un jeu – qui n’en est pas, tant il est incarné – remarquablement soutenu par celui de Stéfan Druet Toukaïef, dont les tourments goebbelsiens transpercent véritablement l’antre de la salle de spectacle.
A inscrire en vos agendas
Apolline Elter
Bunker – Lettres de Magda Goebbels – lecture spectacle écrite par Christian Siméon, lettres fictives mises en lecture par Johanna Boyé., avec Julie Depardieu et Stéfan Druet Toukaïef,
Au théâtre Tristan Bernard, 64 rue du Rocher 75008 PARIS
Représentations Jeudi 19h et Vendredi 21h- (Relâche le 10 novembre 2023) Durée : 1h10
Site: https://www.theatretristanbernard.fr/bunker/