Madame Zola

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C’est par l’« épisode fondateur  » et tragique de l’abandon de son bébé – une « Caroline » de 4 jours – qu’Evelyne Bloch-Dano entame la biographie d’ Eléonore Alexandrine as  Gabrielle Meley (1839- 1925) future Alexandrine Zola.  La jeune femme ne pourra plus concevoir d’enfant. Cette stérilité s’accompagne, sa vie durant, d’un sentiment de culpabilité, diffus, latent, difficile à supporter. Qui s’exprimera, faute de mots,  par des maux répétés

Certes.

Il ne faut toutefois pas réduire Gabrielle à cet épisode fondateur, Alexandrine, à sa seule qualité d’épouse d’Emile Zola

Issue d’un milieu modeste, la jeune, fougueuse, sensuelle  et jolie fille- elle pose pour Paul Cézanne – rencontre Emile en mars 1864, l’épouse le 31 mai 1870 – elle a 31 ans – optant de façon définitive, cette fois, pour le prénom d’Alexandrine.  

 Elle épouse l’homme mais aussi la carrière d’écrivain, de journaliste, de proscrit… dont elle sera un pilier fort, indispensable.

Le couple s’écrit, quand il est séparé, de longues missives, tendres et , dans le chef d’Alexandrine, parfumées de cet humour acidulé, pétri d’autodérision dont elle a le secret.

Fine cuisinière, Alexandrine est l’âme de ces soirées de Médan sur lesquelles nous reviendrons amplement.

Coup de tonnerre fin 1891: Alexandrine apprend la liaison de son mari avec leur lingère la charmante Jeanne Rozerot.

Passée la réaction de stupeur, de sidération, de colère abyssale que lui dicte son caractère entier et emporté, Alexandrine composera avec la « bigamie » de son mari, tout le reste de sa vie.

Elle s’attache à Denise et Jacques, les enfants d’Emile et Jeanne, puis à cette dernière, à la mort inopinée, fin 1902, de l’être qu’elles se partagent.

Peut-on être plus généreuse? 

Plus amoureuse? 

Je ne le crois pas; Emile Zola non plus qui ne pourra jamais se séparer d’Alexandrine.. ni de Jeanne.

Soucieuse de respectabilité, Alexandrine saura faire face à une humiliation publique et se laisser guider par la grandeur de son coeur.

Les enfants le lui rendront bien, qu’elle instituera ses légataires universels  (pour moitié avec la Fondation Emile Zola), à son décès, après leur avoir fait adopter le patronyme d’Emile-Zola.

Avec la finesse qui caractérise sa plume, un don d’introspection et d’empathie saisissant, Evelyne Bloch-Dano rend hommage à une bien grande dame.

Une découverte que je vous recommande haut et fort.

Apolline Elter 

Madame Zola, Evelyne Bloch-Dano, biographie, Ed Grasset, 1997, 372 pp ( rééditions en Livre de Poche)