L’exil de Zweig et son suicide, le 22 février 1942 ont fait couler beaucoup d’encre, généré de nombreuses incompréhensions. Rarement, à ma connaissance, auteur ne s’est penché avec plus de minutie, de correction aussi, que George Prochnik sur les chronologie et circonstances exactes de la retraite zweguienne, la destruction d’âme massive opérée par la répression nazie, auprès du célèbre écrivain autrichien.
Né en une Vienne intrinsèquement antisémite – sous un mode larvé et sans doute banalisé – Stefan Zweig est poursuivi jusqu’en son suicide par une identité qu’il ne s’est pas choisie. Il n’est pas pratiquant; avant d’être juif, il est surtout un Européen convaincu – nous l’avons déjà souvent évoqué. Traqué par d’innombrables compagnons d’infortune, Zweig vit péniblement son exil new yorkais ; sa générosité n’est pas en reste mais les demandes sont infinies. Et puis, il pratique désormais une langue maternelle, passée à l’ennemi, « coupée de son sens« , n’est-ce pas invivable pour un écrivain ?
Sondant avec acuité toutes les étapes de la vie de Stefan Zweig, ses relations à sa mère, à Friderike von Winterniz, sa première épouse et à Lotte Altmann, la seconde, George Prochnik offre un éclairage aussi intéressant que prodigieusement documenté. Il puise dans ses propres racines familiales d’exilés, la compréhension vécue du traumatisme de l’exil.
Ce n’est pas sa moindre qualité.
Une lecture recommandée.
L’impossible exil- Stefan Zweig et la fin du monde, Georges Prochnik, essai traduit de l’anglais (USA) par Cécile Dutheil de la Rochère, Ed. Grasset, sept.2016, 448 pp
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