Clairement planifié, le suicide conjoint de Stefan et Lotte Zweig, le 22 février 1942, a bouleversé, au-delà de l’entourage proche, ce Brésil qui fut leur terre d’accueil et les innombrables lecteurs de l’écrivain de génie.
La publication de lettres que le couple écrivit, à deux plumes, principalement à Manfred Altmann, frère de Lotte et son épouse Hannah, de 1940 à 1942, révèle les états d’esprit successifs de gratitude et d’abattement qui étaient leurs.
Conscient et coupable de la vie privilégiée qu’il connaissait au Brésil, loin de la guerre que se livrait l’Europe et de ses repressions antisémites, le célèbre écrivain, « épistolier invétéré« , se tourmentait continuellement pour ses proches restés en Europe.
L’isolement que s’imposa le couple, le retrait progressif des mondanités et de l’accès à la culture, les violentes crises d’asthme de Lotte, la morosité inattendue de l’hiver brésilien, la perspective « terrifiante » du soixantième anniversaire de Stefan, les nouvelles désastreuses concernant le conflit armé, leur impuissance à aider leurs proches, l’aliénation ressentie…..eurent raison de leur dernière confiance en la vie.
Du Brésil et de Petropolis qui fut leur dernière demeure, mais aussi d’Argentine et de New York où le couple séjourna de janvier à août 41, les lettres révèlent le quotidien du couple, leur altruisme, l’élégance généreuse et courtoise de Stefan Zweig et le tempérament de Lotte si injustement occulté par la postérité.
Le recueil se referme sur les lettres du 21 février et l’hommage que leur rendit leur voisin et ami, le Docteur Ernest Feder.
Un témoignage poignant.
AE
Stefan et Lotte Zweig – Lettres d’Amérique – New York, Argentine, Brésil 1940-1942, Edition établie et préfacée par Darién J; Davis et Olivier Marshall – traduit de l’anglais par Adrienne Boutang et Baptiste Touverey, Grasset, novembre 2012, 306 pp, 22 €
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