Les vérités parallèles

« Alors Arnaud s’est su condamné. Condamné à l’imposture, et condamné à l’illusion. »

Arnaud Daguerre veut bien faire. Sans doute veut-il être aimé; enfant unique de parents brillants, bourgeois et austères. Peu enclins à l’affection.

Alors trafiquer le résultat de son contrôle de maths, de 1 à 10/10 – il suffit d’un zéro – se présente à lui comme la seule possibilité de ne pas se confronter au diktat parental

Ratant l’avion qui doit le mener en Bosnie pour un périple en solitaire à la fin de son premier cycle d’études,  le jeune homme se confine dans un appartement, potassant les comptes rendus du Routard et de Nicolas Bouvier.

Ca tombe bien il aime lire.

Quand il intègre la rédaction du Miroir.fr, Arnaud brille par sa bonne éducation et le soin apporté à la rédaction des articles.

Alors, il est promu grand reporter, envoyé sur le front des cités explosives, d’une Syrie implosée

Mais Arnaud est couard et préfère s’imprégner des ambiances, refugié dans une chambre d’hôtel et tracer des interviews à grande valeur introspective, interrogeant une palette variée de témoins,  spontanément placés sur le chemin … de son imagination.

Et cela marche, il gruge tout le monde, sa direction, ses confrères et se voit attribuer le prestigieux prix Albert Londres

« Arnaud tient entre ses doigts ce pouvoir vertigineux: celui de transformer le réel, de créer des vérités parallèles. Mais ce pouvoir a un prix. Et la réalité, hélas, se charge de ne jamais le laisser l’oublier. »

C’est compter sans Rudy, son démon intérieur et surtout sans Rodrigue Pasero, un pigiste intègre qui flaire le coup fourré, le traque, espère qu’il craque

Divisée en trois actes Gravir/ Basculer / S’évaporer, la narration épouse avec finesse et élégance la voie inéluctable- et morale – de la tragédie.

N’est pas imposteur qui veut

Et c’est tant mieux

Un gras coup de coeur de cette rentrée littéraire

Apolline Elter

Les vérités parallèles, Marie Mangez, roman, Ed Finitude, août 2024, 256 pp

Question à l’auteure:

AE : Arnaud reste un personnage attachant malgré son imposture : on sent davantage sa faiblesse, son impossibilité à sortir de l’impasse qu’il s’est créée qu’une quelconque volonté de nuire. Cette fiction vous a-t-elle été inspirée par le cas de Claas Relotius, grand reporter auprès du magazine allemand « Der Spiegel »    qui signifie « miroir » en français  et qui avait secoué la presse fin 2018 ?

Marie Mangez : « Oui tout à fait, Relotius a en effet été ma première source d’inspiration !

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