Les romans de la Corse

9782268074023.jpgL’âme corse existe. Elle est complexe. Riche, duelle, équivoque, ambivalente. Eprise d’ordre sinon de loi, et de justice… de clan. De reconnaissance… sous des velléités d’indépendance. Affective plus que raisonnable… 

« Allons à l’essentiel : le désamour entre les Français du Continent et la Corse est un secret de Polichinelle. A cet égard, l’affaire Yvan Colonna aura été le révélateur d’un malaise persistant. Il n’est pas besoin de faire en Corse une enquête approfondie pour sentir que cet imbroglio politico-judiciaire aura été l’occasion pour de nombreux insulaires, d’exprimer, plus que jamais, leur défiance à l’égard des institutions de la République. »

 Conjugant une science familiale, ancestrale, politique, culturelle, historique et philosophique de la Corse, deux plumes, autorisées et fraternellement concertées, Paul-François et Angèle Paoli offrent à la collection des « romans des lieux et destins magiques » dirigée par Vladimir Federovski un opus intéressant, dénué de complaisance suspecte.

 «  Ile passionnelle, île fusionnelle et confusionnelle, qui vous inclut ou qui vous rejette : il est impossible de qualifier la Corse en un trait. »

 Mythes fondateurs, historique de l’Ile de Beauté et origine de son annexion plutôt bien perçue à la France, autochtones et visiteurs célèbres sont passés au crible d’une brillante analyse qui tente de faire objectivement le point sur les relations équivoques des Corses envers l’Etat.. Un ressentiment finalement assez récent qui trouverait son origine dans un trauma ancré dans les années ’60 : le rapatriement, par l’Etat gaulliste, de Pieds-Noirs en l’Ile, auxquels sont accordées des terres cultivables à un taux de crédit inique par rapport à celui proposé aux autochtones : « Une erreur psychologique dont on se demande comment un homme aussi intelligent et averti des ressorts profonds de la psyché humaine que de Gaulle, a pu la laisser commettre. »

 Terre singulière, d’une rare beauté, la Corse n’a pas fini de livrer ses romans insulaires, insolents et diantrement fascinants à qui refusera de la réduire à son simple destin estival, paradis, s’il en est, vacanciers.

Apolline Elter

 

Les romans de la Corse, Angèle Paoli et Paul-François Paoli, essai, Editions du Rocher, juin 2012, 232 pp, 20,20 €