Pas de rentrée littéraire, sans Amélie Nothomb
C’est le mantra du Pavillon
Et la coutume renouvelée chaque année
De lui consacrer notre premier billet
L’écrivain se dit fascinée par « les prénoms épicènes » – communs aux deux sexes sans distinction de prononciation ni d’orthographe – et leur impact sur la vie de leurs attributaires.
Son 27e roman cible, partant, le trio formé par le couple de Claude (lui) et Dominique (elle) et leur fille unique, Epicène, au départ des années 1970
Claude est un être obscur, arriviste, arrogant et pervers: il nourrit l’ambition de « monter » à Paris , d’atteindre la Rive gauche, d’assouvir une sourde vengeance.
Il séduit Dominique, l’englobe dans son projet de vie, par le simple ambassade d’un parfum emblématique: Le N° 5 de Chanel
La naissance d’Epicène, en 1974 suscite d’emblée la répulsion de Claude, sa vive détestation.
Plus clairvoyante que sa mère, Epicène réalise le côté monstrueux de son père , vit comme une « mise à mort » , à 11 ans, la rupture qu’il induit, avec Samia, sa meilleure amie
» Entre ses onze et quatorze ans, la gosse était morte pendant plusieurs siècles. Ces années de cœlacanthe lui avaient donné accès aux archives des Enfers . »
Et c’est ainsi que par une inversion des rôles chère à l’auteur, l’enfant est amenée à protéger sa mère contre ce père délétère, à triompher elle-même de la haine qu’elle lui voue
Incarnation du verbe » to crave », Epicène est le centre fascinant d’une tragédie parfaitement cornélienne, d’une vengeance et d’une mise à mort, parfaitement freudienne.
Si nothombienne.
Apolline Elter
Les prénoms épicènes, Amélie Nothomb, roman, Ed. Albin Michel, août 2018, 160 pp