» Les lettres ont-elles ce pouvoir de créer un lien particulier entre ceux qui les écrivent? »
Tel est l’enjeu de ce formidable roman à vocation ..épistolaire
Et la réponse est oui. Bien évidemment
Vous saisissez comme je fus attirée par le propos, consciente dans le même temps de la difficulté de maintenir une tension narrative dans un roman constitué d’échange de lettres
Et bien, c’est tout gagné.
Créé à l’initiative d’Esther Urbain , une libraire quadragénaire, l’atelier épistolaire va mettre en « correspondance » des hommes et femmes d’âges et d’univers radicalement différents: Jean homme d’affaires, quinquagénaire désabusé, Jeanne, sexagénaire solaire, veuve inconsolée, Juliette et Nicolas, un couple dévasté par la naissance d’Adèle et l’impossibilité pour Juliette d’assurer sa maternité, Samuel, un ado en légère perdition, percuté par la mort de son frère aîné.
Obéissant aux consignes d’Esther, les épistoliers vont s’écrire, confiant peu à peu au papier et aux destinataires de l’atelier , les questions existentielles qu’ils se posent à ce moment de leur vie. C’est leur âme qui jaillit peu à peu de leur plume. La glace se brise rapidement et chacun des scripteurs prend le risque de « sortir de sa zone de confort »
Et dé réaliser la force bénéfique sinon thérapeutique de mettre des mots sur leur mal-être et de donner une place au temps, à la lenteur -relative – du transit postal
Sortis de la notion d’immédiateté, les propos s’inscrivent avec force sur le papier
Avec bienveillance. Humanité
Une lecture hautement recommandée
Apolline Elter
Les lettres d’Esther, Cécile Pivot, roman, Ed Calmann-Levy, aût 2020, 270 pp
Billet de faveur
AE : L’échange des lettres entre les participants à l’atelier a bienfaisance thérapeutique. Il constitue quasiment pour chacun une « bouée de sauvetage ». Avez-vous participé ou organisé ce genre d’atelier ?
Cécile Pivot : Non. L’atelier d’écriture était pour moi le bon prétexte pour écrire un roman dont le fil conducteur était la correspondance écrite. Aujourd’hui, on ne s’écrit plus de lettres. Ou si peu.
L’atelier d’écriture est une sorte de psychothérapie pour chacun de mes personnages car ils se confient facilement. Ils s’aperçoivent qu’avec un papier et un crayon, seul à sa table, on n’emploie pas les mêmes mots, on se concentre davantage, on s’implique davantage et nos pensées prennent des chemins de traverse auxquels on ne s’attendait pas.
Après la sortie des Lettres d’Esther, j’ai participé à deux ateliers d’écriture. Un à la Maison de la Poésie et l’autre à l’atelier Les Mots. C’était très intéressant car j’ai eu la confirmation qu’en écrivant une lettre à quelqu’un, on livre des choses de soi très intimes.