« Chez les D., on était affirmatif. Et ce qu’il y avait en moi d’incertain et d’anxieux était attiré par la cohérence et la fermeté. »
Fascinée par la ravissante Sybil D. et l’ambiance d’une famille plus structurée que la sienne, la jeune Laurence – mais oui, c’est un récit autobiographique – évoque l’amitié intense qui lie les deux fillettes, quatre années durant, de 10 à 14 ans. Une tranche d’âge qui confond aisément les sentiments d’amour et d’amitié.
Des sentiments qui vont ensuite, insidieusement se déliter sans autre explication logique et postérieure que le mal-être grandissant de Sybil, drastiquement enfoui sous une façade sociale résolument victorieuse.
« . Je sentais bien sa détresse, mais je n’avais pas la maturité qui m’aurait permis de l’amener à parler. »
La métamorphose de Sybil, mariée et mère de famille, alerte la narratrice sans que cette dernière ne perce le « secret » qui préside à son extinction
« Dès ce moment j’ai su que j’écrirais sur elle. Bâtir un tombeau, ou l’écrire, »
Et de mener une large enquête posthume auprès ceux qui la côtoyèrent un temps, pour rendre hommage à la vérité de cette amie perdue.
Un hommage vrai, poignant, doublé d’une intéressante chronoscopie des années de jeunesse de l’auteure
« Mon ajout tenait en trois phrases. De dix à quatorze ans j’ai vécu dans la joie que donne l’amour. Avant, mon enfance avait été anxieuse. Après, il m’a fallu longtemps pour trouver un équilibre vivable. Mais entre-temps, pendant cinq ans, Sybil a été mon soleil. »
Apolline Elter
Le secret de Sybil, Laurence Cossé, roman, Ed. Gallimard, janvier 2023, 144 pp