« . C est ainsi que les choses ont commencé. Je me suis vraiment dit: tu descends dans la rue, tu abordes la première personne que tu vois, et elle sera le sujet de ton livre. »
On ne peut mieux résumer le propos du nouveau » Foenkinos »
En proie à une panne d’inspiration abyssale, le narrateur, romancier de son état, décide de confier sa plume au hasard de la rue..
» Mon regard fut happé. Cette femme ne le savait pas encore, mai elle venait d’entrer dans le territoire romanesque »
Et c’est ainsi que Madeleine Tricot, octogénaire ingénue, atteinte d’un début d’Alzheimer se voit offrir une tribune aussi unique qu’incongrue pour convoquer ses souvenirs, l’histoire de sa vie
Pour mener à bien son projet, le romancier doit montrer patte blanche auprès de la famille de son héroïne. La famille Martin, comme vous l’avez devine.
Une famille est dotée d’un patronyme d’une banalité affligeante – ce fut, à une époque, le nom de famille le plus répandu en France – à l’image de sa vie.
« Je pénétrais dans une famille fatiguée, qui s’était laissée embarquer dans une routine certaine; des passagers d’une même vie qui finissaient par se frôler sans se rencontrer. «
Une famille constituée de Valérie, Patrick, 45 ans tous deux et de deux ados désabusés, Lola, 17 ans, et Jérémie, 15 ans
« Malgré leur accueil réservé, ces gens-là me touchaient; je ressentais leur fragilité, et elIe faisait écho à des émotions que j’avais pu éprouver également. Nous étions unis dans la stupéfaction du quotidien essoufflé »
Une leçon de création, en quelque sorte
Et le romancier de déployer la puissance – abyssale – de son imagination, de nous convier, heureux lecteurs élus, dans le labo d’élaboration de la fiction
D’analyser l’impact de pareille incursion dans le destin des protagonistes.
Et celui du narrateur……
Une merveilleuse récréation, dans tous les cas
La mise en abyme jubilatoire de la construction d’un roman
Apolline Elter
La famille Martin, David Foenkinos, roman, Ed. Gallimard, octobre 2020,, 228 pp