» Je n’allais pas redevenir aveugle pour lui redonner sa raison d’être »
C’est un roman à deux voix que nous propose Didier van Cauwelaert, celles de Zibal de Frèges, vendeur aéroportuaire de macarons chez Ladurée et d’Alice Gallien, future ex-aveugle, canon. Via ces protagonistes, il nous en offre une troisième, voie d’accès captivante à la psychologie canine: chien d’aveugle parfaitement dressé, le labrador Jules se voit d’un coup privé de son utilité, de sa raison d’être, par une miraculeuse opération de la cornée qui rend la vue à sa maîtresse.
« L’enthousiasme autour de moi, l’émerveillement que suscite ma guérison me laissent un sentiment de solitude honteuse que jamais le handicap n’a provoqué. »
Rendue lucide sur la relation homosexuelle– « rempart », en perte de vitesse, qui l’unit à Fred Bellanger – « L’aveuglement désormais est de son côté » – Alice tente de retrouver un certain vendeur de macarons qui lui a sauvé la mise, à l’aéroport d’Orly et qui pourrait bien réparer sa vision des hommes…. Surtout que Jules a lui-même jeté son dévolu canin et encombrant sur Zibal, le seul être capable transcender la trahison des homme….
Pétri d’humour, d’autodérision et d’un zeste d’anthropomorphisme, le roman suscite une réflexion assez poignante sur le rapport de l’homme au chien, sur les dégâts d’une guérison inopinée, d’un sevrage forcé.
Jules, Didier van Cauwelaert, roman, Ed. Albin Michel, avril 2015, 280 pp
Billet de faveur
AE : Didier van Cauwelaert, votre passion pour les chiens d’aveugles remonte à votre enfance ; dans le roman, Zibal rencontre un comportementaliste qui traduit clairement la désespérance de Jules, l’injustice qu’il ressent et son sentiment d’abandon. Vous avez rencontré un tel spécialiste pour construire le roman ?
Didier van Cauwelaert : Souvent, j’invente d’abord et je vérifie ensuite. C’est ce qui s’est passé avec « Jules ». Le comportementaliste auprès duquel j’ai vérifié certains détails, après coup, s’est du reste identifié à mon personnage, comme si je m’étais inspiré de lui…
AE : Outre les malvoyants, le chien d’assistance peut également prêter patte forte aux personnes atteintes d’épilepsie :
Didier van Cauwelaert : 10% des chiens sont capables de détecterr de manière innée une crise d’épilepsie chez leur maître, 15 à 45 minutes avant qu’elle se produise. C’est sans doute un dérèglement électromagnétique qu’ils perçoivent dans son cerveau. Aux Etats-Unis, au Canada, au Royaume-Uni, la formation de ces chiens donne des résultats extraordinaires. Leur présence, leur action préventive empêchent un grand nombre de décès par chute, et réduit la fréquence des crises. En France, tout reste à faire. Je m’y emploie, en tant que parrain de la Fondation pour la recherche sur l’épilepsie (500 000 malades, dont plus de 100 000 enfants)
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