« Seul dans son silence, Antoine ploie sous cette existence à reconstruire, sous le poids de ce qu’il doit accomplir pour retrouver l’ancrage qui était le sien dans la société, il ploie parce qu’il n’a pas envie. Pas envie de retrouver du travail, pas envie de tout recommencer, pas envie de courir encore après un prestige de pacotille. Pas envie. Le visage calé dans sa main droite, il considère ses erreurs de jugement, ses égarements, ses emportements, il soupèse dix ans, dix ans et le vide étourdissant. »
Cadre jeune, dynamique, Antoine perd son job et les repères d’une réussite insolente, par trop focalisée sur les aspects matériels , les poncifs d’une vie réglée d’avance. Il décide peu à peu de rompre avec ce schéma existentiel et la vie de couple toute tracée qu’il mène aux côtés de Mélanie:
« Empêtrée dans une vie professionnelle chronophage, conditionnée par un esprit revanchard, obsédée par un idéal de vie aussi médiocre que fantasmagorique, Mélanie s’absout de tout. »
Subtile radioscopie d’un conformisme de vie, des réflexes qui l’emprisonnent et de l’insidieux effritement d’un couple, le roman de Jennifer Murzeau – le deuxième de sa plume – affiche une vraie maîtrise d’écriture: il allie oralité, style indirect et celui de l’écrit en un cocktail savoureux, bien négocié, tragi-comique, délicieusement rythmé.
Une belle révélation.
AE
Il bouge encore, Jennifer Murzeau, roman, Ed. Robert Laffont, août 2014, 256 pp
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