Une lecture majeure. Frappée de grâce et d’éternité.
« Ils étaient des Gitans français qui n’avaient pas quitté le sol de ce pays depuis quatre cents ans. »
Autour de la vieille Angéline et de ses cinq fils gravitent brus et bambins. Ils mènent une existence d’une précarité absolue: « Oui, la vitalité était enfermée en eux. Partout ils trouvaient leurs marques. Le ravitaillement sans argent, l’eau potable qu’il fallait chercher à la pompe, les sources occasionnelles de revenu, les tournées des hommes dans la banlieue, tout cela eût semblé à d’autres une existence impossible et tout cela assurait un rythme à leur vie. »
(…)
« Une femme pourtant venait chaque semaine. Elle connaissait les Gitans depuis près d’une année sans avoir vaincu leur sauvagerie. C’était la responsable d’une bibliothèque. Elles pensait que les livres sont nécessaires comme le gîte et le couvert. Elle s’appelait Esther Duvaux. »
Ainsi se tisse une relation entre les gitans et la « gadjé » , rythmée par les lectures hebdomadaires qui réunissent les enfants du camp. Une relation qui prend un tour vital, empreinte d’écoute, d’échange et de respect.
Alice Ferney nous avait séduite par L’élégance des veuves (voir chronique), elle nous ravit par ce bijou d’écriture, au rythme apaisant, enveloppant et un don inné pour magnifier ce que la vie a de sordide sans jamais verser dans la mièvrerie ou les considérations à l’emporte-pièce.
Une lecture majeure. Je vous le certifie.
Apolline Elter
Grâce et dénuement. Alice Ferney, Actes Sud 1997, rééditions régulières auprès de Babel,
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