Ecouter les eaux vives

« La première fois qu’Adrian Ramsay avait mis pied à bord d’un sous-marin, elle avait eu la nette sensation de pénétrer un corps vivant, une matrice dont la grande respiration métallique la ramenait à l’origine de tout. L’atmosphère moite, bourdonnante l’avait immédiatement happée, de même que cette impression de langueur sensuelle qu’elle associerait toujours à la vie confinée. li ne s’agissait pas là, contrairement aux idées reçues, de grand silence, d’enfermement et de noirceur, mais bien d’une petite société insulaire dont l’exiguïté rassurait plus qu’elle n’oppressait, d’une bulle protégée dans laquelle régnait une activité permanente. »

Adrian est lieutenant (e?)  auprès de la Royal Navy. Elle enchaîne les missions au sein de sous-marins nucléaires où elle exerce son « oreille d’or » – un sens acoustique surdéveloppé  – dans la détection des bruits issus des profondeurs. Elle possède, en d’autres termes le « statut d’analyste en guerre acoustique ».

« Quiconque se demandait ce qui se passait à terre pendant les patrouilles n’avait qu’une seule issue, la folie. »

Confinée, coupée du monde, des événements durant les longues patrouilles, Adrian sent vibrer en elle les eaux vives de la sexualité dès qu’elle remonte sur terre, lesquelles l’entraînent dans une passion improbable et délétère pour Abel, un jeune ermite breton,  aveugle et retiré du monde lui aussi, dans une solitude « diogenesque »

Amarinée d’une précision technique et langagière hors du commun et d’un sens romanesque avéré, Emmanuelle Favier nous invite dans un monde méconnu, fascinant quoique quelque peu oppressant,nourri de beauté, de mystère et d’intenses vibrations.

Apolline Elter

Ecouter les eaux vives, Emmanuelle Favier, roman, Ed. Albin Michel, janvier 2025, 352 pp

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