» Oui, je n’avais pas fini de me faire du mauvais sang.
Et Dieu merci. »
De sang, de dieux, bénis, haïs, aborés, il est question dans ce nouveau roman d’Harold Cobert, dévoué à l’amour – conjugal -et à la paternité – un moment avortée…
« Cet été-là, je sortais d’une liaison qui m’avait laissé exsangue de sentiments et de désirs. »
C’est alors que le narrateur rencontre, à Biarritz, celle qui devient d’emblée la femme de sa vie, celle avec qui lui prend l’envie de concevoir un enfant. Las, saluée dans l’allégresse, la grossesse se voit bientôt interrompue, d’un filet de sang pernicieux, implacable, grossissant…
Rythmés d’extraits – poignants – des « Contemplations » (Victor Hugo) , les chapitres s’égrènent qui, à travers un regard de père et de mari aimant, nous font vivre les affres … de la maternité et les épreuves dont elle est parfois jalonnée.
« – Vous êtes jeunes, tous les deux. Et puis, je vous l’ai dit hier, deux femmes sur trois font au moins une fausse couche dans leur vie. C’est dur pour vous, je le sais, mais ça reste néanmoins…banal
J’ai eu une soudaine envie de lui sauter à la gorge et de lui éclater la tête contre le mur. Je n’en ai évidemment rien fait. D’un point de vue médical et statistique, elle avait raison. Je le savais. C’était la logique comptable qui était impersonnelle et inhumaine, pas elle. »
Apolline Elter
Dieu surfe au Pays basque, Le père interrompu, Harold Cobert, roman, éd. Héloïse d’Ormesson, février 2012, 160 pp, 15 €
Billet de faveur
AE: Harold Cobert, la veine de ce récit autobiographique est nourrie de sang, sang de vie, sang d’amour et de mort. C’est important pour vous, cette pluralité de… sens ?
Harold Cobert : Oui, bien sûr, la littérature joue sur la polysémie. C’est sa manière d’être poétique, travailler dans les zones d’ombre du langage. Cette multitude de sens est le sang de l’écriture.
AE: Le titre du roman laisse un peu perplexe. Pourquoi Dieu surfe-t-il au Pays basque; Cela paraît un peu …vague, n’est-il pas?
Harold Cobert : En effet ! Vague comme le vague à l’âme du narrateur, confronté à l’épreuve douloureuse de la fausse couche de sa femme. Ce drame est envisagé de son point de vue, celui de l’homme, l’angle mort silencieux de ce genre d’événement, auquel on ne s’intéresse généralement pas et auquel on ne donne que très peu la parole. Comme il est surfeur, Basque, qu’il a rencontré sa femme au Pays basque, lorsqu’il prend de plein fouet cette terrible nouvelle de la perte de leur enfant à naître, il a la désagréable impression que Dieu les a laissé tomber et qu’il s’est tiré surfer au Pays basque avec ses potes ! D’où le titre, aux accents à la fois drôles, légers, absurdes et grinçants.
AE: Est-ce une frustration pour un homme que de vivre une grossesse par procuration?
Harold Cobert : Non ! Comment éprouver de la frustration face à la loi de la nature et de la vie ? En revanche, l’interruption brutale d’une paternité en construction comme c’est le cas avec ce qu’on appelle les fausses couches précoces, elle, oui, est extraordinairement frustrante. Pire : elle laisse un goût amer, un goût d’injustice et de révolte. Et pourtant, il faut faire face. Pour celle que l’on aime et qui souffre dans sa chair.
Harold Cobert sera présent en Belgique, ce week-end des 20 et 21 avril.
Vous pourrez, notamment, le rencontrer, demain, vendredi 20 avril, à 19h30, à la Librairie Papyrus (Namur) et samedi 21, de 15h30 à 17h, chez Cook & Book, à Bruxelles (près du shopping de Woluwe)
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