Il séjournait dans un coin de votre esprit, vous le retrouvez comme un vieil ami, le phrasé de Véronique Ovaldé, balancelle rythmée, oscillant d’une quête analytique et sans fin, vers l’expression de la vérité. La vérité des âmes.
« …Taïbo avait cette sorte de pudeur qui lui interdirait toujours d’être plus qu’un lieutenant de police dans une ville désertée la moitié de l’année, il ne pouvait simplement pas poser la question qui fâchait, pris qu’il était d’une empathie encombrante.«
Appelé à enquêter sur l’occupation clandestine de villas en l’absence de leurs riches occupants, le lieutenant Taïbo fait la connaissance de Vida Izzara.
Paloma, la fille de cette dernière, s’est envolée, quittant le nid familial et la magnifique propriété de Villanueva Nueva où résident ses parents.
Cette fuite est l’occasion pour Vida Izzara de remettre sa propre existence en question et de fuir la cage dorée dans laquelle Gustavo, son mari, la comprime.
Au départ d’une intrigue minimaliste – il n’est question pour les protagonistes que d’éprouver les ailes de leur liberté – Véronique Ovaldé aspire le lecteur dans la spirale d’une narration rythmée, majestueusement imagée.
Apolline Elter
Des vies d’oiseaux, Véronique Ovaldé, roman, Editions de L’Olivier, août 2011, 238 pp, 19 €
Billet de faveur
AE : Véronique Ovaldé , la métaphore aviaire traverse le roman : Paloma désigne la « colombe » en espagnol, ses parents vivent dans une villa climatisée, véritable cage, dont on ne peut ouvrir les fenêtres, Vida a une cervelle d’oiseau – du moins aux yeux de son mari – et son père, atteint d’Alzheimer, tente de démêler les fils d’un « cerveau aux repères volatils ». Le récit en devient presque une allégorie. Comment s’est-elle imposée à vous ?
Véronique Ovaldé : c’est en prenant le petit recul que donne la lecture de son propre manuscrit que je me suis rendu compte que mon roman était habité par des oiseaux. Que leur nature volatile, légère, tragique, joyeusement périssable se déployait au fur et à mesure de l’histoire.
AE : Paloma s’interroge : « Il n’y a donc jamais d’autre solution que de partir ? » Faut-il obligatoirement quitter le nid (familial) pour connaître la liberté ? Pour accéder à une meilleure connaissance de soi ?
Véronique Ovaldé : La rupture, le départ, la disparition me semblent nécessaires et souvent inacceptables. Il faut, me semble-t-il, se défaire de ses liens et revenir sans cesse à notre nature solitaire…
AE : En quoi consiste votre madeleine de Proust ? (C’est la question rituelle de nos billets de faveur)
Véronique Ovaldé : En voici quelques-unes en vrac :Le Dix de Balenciaga, le cri des martinets, Luis Mariano, le bruit du ressac assourdi par le plomb d’un soleil à son midi, les cheveux électriques quand on enfile un col roulé en polyester, l’odeur de la gouache…
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