Ce livre n’est pas un livre qui raconte la grande Histoire. Les historiens s’en sont déjà chargés. D’autres suivront. Ce livre raconte les souvenirs d’une petite fille, d’une adolescente, d’une femme qui voua à son père un amour, une admiration sans bornes. Une femme qui vécut dans son ombre, qui l’accompagna dans tous ses combats, ses victoires et ses défaites. Une femme qui se lança, elle aussi, en politique. Pour s’y faire un prénom, Antoinette, dans un parti fédéraliste, le dernier engagement de son père. Mais non le moindre.
D’entrée de propos Francis Van de Woestyne balise le contenu des quelque quinze entretiens réalisés en l’appartement d’Antoinette Spaak, de la lecture des carnets et notes que la femme d’Etat lui a confiés. Les questions sont précises,directes, vives, les réponses fusent, sans tabou, qui donnent à la lecture un tour alerte, vivifiant. Prodigieusement intéressant.
De ce virus de l’action politique injecté par son célèbre père, Paul-Henri Spaak, la jeune femme ne fera usage qu’ après son décès – le 31 juillet 1972 – la quarantaine passée, ses deux enfants élevés, vie de femme au foyer et de mondanités assumée… Elle embraie sur la « conscience fédéraliste » que le grand homme lui a inculquée, entre au FDF, à l’invitation conjointe de Lucien Outers et André Lagasse, et poursuit parallèlement l’oeuvre de construction de l’Europe dont il fut un des pères fondateurs.
Si elle quitte officiellement la vie politique en 1999, Antoinette Spaak garde une conscience aiguë de son évolution, du danger que représenterait pour les francophones une séparation entre les Wallons et les Bruxellois, de l’asphyxie de gestion d’une Commission européenne dépassée par le nombre de ses pays membres .
Agnostique, républicaine, « femme engagée » et de tempérament, Antoinette Spaak se révèle sans faux-semblants. Elle traduit une vraie ouverture d’esprit, un respect de la chose politique, de ses acteurs, qui dépasse les clivages traditionnels. Ce faisant, elle offre au lecteur une leçon de maturité, une leçon de vie des plus bénéfique
Apolline Elter
Antoine Spaak, Entretiens avec Francis Van de Woestyne, Ed. Racine, décembre 2016, 136 pp
Même si je ne suis pas fan de son parti le FDF, je reconnais que ce fut une Grande Dame de notre vie politique. D’abord, elle fut l’une des premières femmes à s’y engager à une époque où c’était moins évident que maintenant. A ma connaissance, il n’y a jamais eu aucun scandale/polémique sur son action politique. Elle défendait ses convictions (que je ne partageais pas toujours) avec classe et élégance.
Par ailleurs, de manière générale, je trouve que çà manque de bonnes biographies de nos responsables politiques comme celle-là (pas des livres écrits ou co-écrits par des politiques pour se défendre ou dresser leur bilan politique). De mon côté, dans un tout autre genre, je viens de parler sur mon blog de « Le géranium de Monsieur Jean » ; l’avez-vous lu, Apolline? J’ai bien aimé.
Un grand merci pour ce commentaire dont je partage pleinement l’opinion
Une grande dame et un compte rendu d’entretiens qui fait du bien
J’ai lu, en effet, le belet tendre roman de Michel Torrekens et l’ai chroniqué également Bonne continuation!! Bien amicalement, Apolline