« Vous me demandez les symptômes de cet amour. C’est premièrement une négative vive et prévenante ; c’est un air outré d’indifférence qui prouve le contraire ; c’est le témoignage des gens qui voient de près, soutenu de la voix publique ; c’est une suspension de tout le mouvement de la machine ronde ; c’est un relâchement de tous les soins ordinaires pour vaquer à un seul ; c’est une satire perpétuelle contre les vieilles gens amoureux :« Vraiment, il faudrait être bien fou, bien insensé. Quoi, une jeune femme ? Voilà une bonne pratique pour moi ! cela me conviendrait fort ! <J’aimerais mieux m’être rompu les deux bras> « A cela on répond intérieurement : « Eh oui, tout cela est vrai, mais vous ne laissez pas d’être amoureux. Vous nous dites vos réflexions, elles sont justes, elles sont vraies, elles font votre tourment, mais vous ne laissez pas d’être amoureux. Vous êtes tout plein de raisons, mais l’amour est plus fort que toutes les raisons. Vous êtes malades, vous pleurez, vous enragez, et vous êtes amoureux. »
Paris, mercredi 9 mars 1672
Extrait de Madame de Sévigné – Correspondance (I) (mars 1646-juillet 1675) – texte établi, présenté et annoté par Roger Duchêne, Gallimard, La Pléiade (1972)
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