La correspondance de Gustave Flaubert nous précise souvent ses intentions littéraires. En janvier 1852, tandis qu’il s’attelle à la rédaction de Madame Bovary, et à une révolution dans la conception du roman, il adresse à Louise Colet le bilan de sa production, esquisse sa vision des choses.
» Je t’ai dit que l’Education avait été un essai. Saint Antoine en est un autre. Prenant un sujet où j’étais entièrement libre comme lyrisme, mouvements, désordonnements, je me trouvais alors bien dans ma nature et je n’avais qu’à aller. Jamais je ne retrouverai des éperduments de style comme je m’en suis donné là pendant dix-huit grands mois. Comme je taillais avec coeur les perles de mon collier! Je n’y ai oublié qu’une chose, c’est le fil.(…) Ce qui semble beau, ce que je voudrais faire, c’est un livre sur rien, un livre sans attache extérieure, qui se tiendrait de lui-même par la force interne de son style, comme la terre sans être soutenue se tient en l’air, un livre qui n’aurait presque pas de sujet ou du moins où le sujet serait presque invisible, si cela se peut. Les oeuvres les plus belles sont celles où il y a le moins de matière; «
A Louise Colet, Croisset, 16 janvier 1852 (soir)
Cité par Bernard Masson in Flaubert. Correspondance – Gallimard Folio 3126 – oct 1998 (rééd. août 2009)
Commentaires récents