« Qu’on se figure un visage plein et oblong, des lèvres charnues d’où oblique une cigarette, un nez contredisant son patronyme, un regard marron-vert qui étonne par sa franchise, un front dégagé par des cheveux plantés haut, où se dessinent deux traits lorsqu’il fronce les sourcils, l’allure sportive de son mètre soixante-dix-neuf : ce sont là des atouts. Il y ajoute ce qu’on appelle à l’époque, le « chic ». L’habillement qui lui sied grâce à la générosité de son oncle Gustave, l’élégance qui parfait la nonchalance, enfin quoi, Albert Camus, beau gosse, aime séduire. Il y a autre chose, ce charme qu’il exerce sur les hommes et les femmes par sa mâle assurance, sa gaieté qui donne de l’entrain, une conversation qu’il épice par l’ironie. Et cet orgueil qui, eu égard à ses origines espagnoles, tient, selon Grenier, de la castillanerie. »
Passionnée depuis l’adolescence par la personnalité et l’oeuvre du célèbre écrivain, la journaliste Macha Séry publiait, il y a deux ans, un brillant essai, focalisé sur la jeunesse et la genèse du grand homme.
Né le 7 novembre 1913, en Algérie, Albert ne connaîtra guère son père. Lucien Camus décède un an plus tard des suites d’une blessure de guerre. Le bambin sera dès lors éduqué par sa maman, Catherine Sintès, personne effacée et surtout par sa grand-mère, à la poigne de fer.
Heureusement, quelques personnes croisent son chemin, qui permettent à l’enfant de braver les limites de sa condition sociale: l’instituteur, Louis Germain, le prof de philosophie, Jean Grenier, avec qui il conversera sa vie durant, son oncle Gustave Acault, et plus tard l’ami, Pascal Pia .. tant de mentors qui forts d’une confiance en ses possiblités et d’un attachement infaillibles joueront les pères de substitution.
Passion du football, de la lecture, de l’amitié, des femmes, du théâtre et du bien de l’Humanité dont il découvre la condition absurde, engagement politique, révolte et malaise durant la guerre d’Algérie, écriture d’essais, de nouvelles, de romans.. balisent un parcours arrêté à maintes reprises par la maladie (tuberculose) , soins et repos forcé.
» A 17 ans donc, il a commencé à mourir »
Débordant largement du cadre thématique prescrit, l’essai de Macha Séry révèle la pugnacité vitale d’un jeune homme qui contracta tôt « cette conscience aiguë de la mortalité »
Apolline Elter
Albert Camus à 20 ans. Premiers combats, Macha Séry, Ed. Au Diable vauvert, coll. à 20 ans, sept. 2011, p 46
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