« Je n’ai jamais raconté les nuits d’avant procès. Les nuits blanches, devrais-je dire, suivies des aubes angoissées où je bois café sur café. Je « possède » mon dossier, je l’ai travaillé jusque dans les moindres détails. Probablement ai-je pris le temps, la veille, de faire une longue marche au hasard des rues ou à travers le Champ-de-Mars. Imperméable aux bruits de la ville et concentrée sur l’affaire : prouver l’innocence ou présenter une culpabilité « humaine », celle à qui nul n’aurait échappé dans les mêmes circonstances. Exposer – toujours –l’irréductible noyau d’humanité que porte quiconque, serait-ce un criminel. Exercice passionnant, presque une jouissance. Celui qui ignore cet étrange bonheur qui mêle, en un nœud permanent, une petite douleur au creux de l’estomac à l’excitation d’une argumentation triomphante ne connaît rien au métier d’avocat pénaliste. «
Une farouche liberté, Gisèle Halimi, , avec Annick Cojean, Ed. Grasset, août 2020, 160 pp