Assassins !

Ce week-end fête un sinistre anniversaire, celui de la mort inopinée d’Emile Zola (1840-1902) le matin du  lundi 29 septembre 1902

Le célèbre écrivain décède par asphyxie,  au pied de son lit et en  son domicile parisien de la rue de Bruxelles,  intoxiqué de monoxyde de carbone, dont les émanations ont   refluéé d’une cheminée bouchée.

Le fut-elle volontairement ?

Beaucoup d’encre a coulé sur les circonstances de cette mort que d’aucuns pensent ourdie par des ennemis d’Emile

C’est la thèse de Jean-Paul Delfino et l’occasion pour ce dernier se pencher sur les vie, oeuvres de l’écrivain et son combat en faveur de la réhabilitation d’Alfred Dreyfus, source  de bien des inimitiés.

Souvenez-vous comme la France  fut longtemps  divisée entre Dreyfusards et anti-Dreyfusards.

Le récit est alerte, saisi de dialogues vivants  et d’une incursion dans la chambre de l’agonisant qui tient , si l’on peut dire, du reportage en « life » :

Dans un brouillard, le dormeur fut saisi d’un nouveau  frisson .  Cette affaire Dreyfus avait réveillé bien des haines. Et  il en avait eu sa part! Lui, qui avait été élevé par une famille  de Beaucerons, on lui avait jeté à la gueule ses racines italiennes. L’on avait aussi dit de lui qu’il était juif. Ou qu’il était payé par les Juifs, c’était égal. Ils avaient reçu des tombereaux de lettres et de menaces sans que la police, pour changer, ne juge nécessaire d’intervenir. De bons Français – anonymes, cette fois  – se demandaient, en substance, où était la Charlotte Corday qui débarrasserait ennn la France de sa putride présence. Sa tête était mise à prix. »

Le talent de l’auteur,  les multiples précisions dont il parsème le récit rendent la thèse séduisante.

Et la lecture diantrement intéressante

Apolline Elter

« Assassins!, Jean-Paul Delfino, roman, Ed. Héloïse d’Ormesson  septembre 32019, 180 pp

Billet de faveur

Billet de faveur

AE : Votre récit aurait pu s’intituler «  J’accuse ! » car vous nommez expressément le gang du complot ourdi contre Zola.   Jules Delahalle, propre valet de l’écrivain , aurait aidé ses « assassins » …

Jean-Paul Delfino : Le roman s’intitule Assassins !. Au pluriel. À mon sens, il n’y a pas eu un responsable à l’assassinat d’Emile Zola, mais bien plusieurs. Des politiciens, des anti dreyfusards, des putschistes, des confrères jaloux, des antisémites bas du front et courts d’idées. La liste n’est pas exhaustive, hélas.

   Au-delà du seul meurtre de Zola, c’est le portrait d’une France livrée à ses démons qui apparaît dans ce roman. Elle est à mille lieues, alors, de ce pays qui a fait souffler sur le monde un vent de liberté et d’égalité. Loin de la révolution de 1789, loin des esprits du siècle des Lumières, c’est une nation déchirée qui entre en scène. C’est une France en plein repli identitaire, recroquevillée sur ses haines, arc-boutée sur la certitude que le juif est cause de tous les malheurs qui la frappe.

En cela, Assassins ! trouve un écho dérangeant dans notre société actuelle. La moitié de notre pays a voulu la mort de Zola. Mais il ne faut pas oublier que l’autre moitié, elle, a pleuré le petit Italien qui s’est battu pour faire triompher ses idées. »

 

 

 

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