« Mon oncle était mort quelques années après ma naissance. J’avais découvert des images de lui dans une boîte à chaussures où mes parents gardaient des photos et des bobines de films en super-8. On y voyait des morts encore vivants, des chiens, des vieux encore jeunes, des vacances à la mer ou à la montagne, encore des chiens, toujours des chiens, et des réunions de famille. »
C’est un récit familial que nous livre le primoromancier, celui de son oncle Désiré, de sa tante Brigitte et de leur fille Delphine, atteints par le sida au début des années 80. La maladie est tabou, ostracisée, apanage des drogués et des homosexuels
Ce faisant, le narrateur amplifie le propos et inscrit le récit dans l’épopée dure et mal comprise des pionniers de la lutte contre le fléau De coups bas également et de captations scientifiques indélicates.
Le récit est sobre, il en est d’autant plus percutant, bouleversant et a raflé une série de distinctions tel le Prix Première, Le Prix Wepler – Fondation de la Poste, notamment. La lecture qu’en opère Loïc Corbery est idoine.
Je vous la recommande haut et fort
« J’ai voulu raconter ce que notre famille, comme tant d’autres, a traversé dans une solitude absolue. Mais comment poser mes mots sur leur histoire sans les en déposséder ? Comment parler à leur place sans que mon point de vue, mes obsessions ne supplantent les leurs ? Ces questions m’ont longtemps empêché de me mettre au travail. Jusqu’à ce que je prenne conscience qu’écrire, c’était la seule solution pour que l’histoire de mon oncle, l’histoire de ma famille ne disparaissent pas avec eux, avec le village. Pour leur montrer que la vie de Désiré s’était inscrite dans le chaos du monde, un chaos de faits historiques, géographiques et sociaux. Et les aider à se défaire de la peine, à sortir de la solitude dans laquelle le chagrin et la honte les avaient plongés »
Apolline Elter
Les enfants endormis, Anthony Passeron, récit, Ed Globe, août 2022, Ed Audiolib, juillet 2023, texte intégral lu par Loïc Corbery, durée d’écoute, 4h 35 min